mosaïque
@Petr Kratochvil

Entre profane et sacré : dialogue mystique à travers les oeuvres

L’art sacré et l’art profane sont deux catégories qui ont souvent été utilisées pour décrire des œuvres d’art en fonction de leur contexte, de leur inspiration et de leur finalité. Ces termes sont généralement associés à des traditions culturelles et religieuses, bien que leur interprétation puisse varier en fonction des époques et des cultures.

Souvent associé à un art ancien, l’art sacré peut toutefois être présent dans de nombreuses œuvres contemporaines. Est-ce que l’art sacré est nécessairement religieux, et l’art profane, par extension, est-il dépourvu de toute sacralité ? Ces deux mondes, celui du sacré et celui du profane, ne trouvent une définition rigoureuse que dans leur relation mutuelle. Ils s’excluent mutuellement tout en supposant l’existence l’un de l’autre. Par conséquent, est-il inapproprié d’utiliser le terme « sacré » pour qualifier une œuvre qui n’a pas de nature religieuse, sachant que ce lien peut être de nature invisible ?

Art sacré et son contexte religieux

L’art sacré a une longue histoire et son émergence remonte à l’Antiquité. Cependant, son développement significatif est souvent associé à l’avènement des grandes civilisations et des principales religions du monde.

L’art sacré est souvent créé dans le contexte de la religion. Il peut inclure des œuvres comme des fresques, des sculptures, des peintures et des objets rituels qui servent à célébrer, représenter ou honorer des figures religieuses, des divinités, des événements sacrés ou des textes sacrés.

Leur inspiration provient des enseignements religieux, des textes sacrés et de la vie des saints. L’objectif est de communiquer des valeurs spirituelles et de transmettre des messages religieux à travers l’art.

L’art sacré dans l’histoire

Art égyptien (vers 3000 av. J.-C. – 30 av. J.-C.) : les anciens Égyptiens ont produit une abondance d’œuvres d’art liées à leur religion, mettant en avant des divinités, des rites funéraires et des symboles sacrés dans des fresques, des sculptures et des hiéroglyphes. Les chambres funéraires des dignitaires égyptiens regorgent de mobiliers, de fresques et d’objets liés aux cérémonies mortuaires.

Art grec et romain (env. 800 av. J.-C. – 476 apr. J.-C.) : les civilisations grecque et romaine ont développé une variété d’œuvres d’art religieuses pour honorer leurs panthéons respectifs. Les temples, les statues de dieux et les fresques mythologiques en sont des exemples.

Art byzantin (env. 476 à 1453) : à la chute de l’Empire romain d’Occident et lors de la chute de Constantinople, l’art byzantin fusionne des influences à la fois orientales et chrétiennes. Des représentations du Christ, de la Vierge et des Saints s’expriment à travers des icônes, qui sont des œuvres picturales créées sur des panneaux de bois, puis à travers des fresques et des mosaïques.

art byzantin

Art roman (Xe – XIIe) : son influence puise ses racines dans les périodes antique, carolingienne et byzantine. L’art roman s’est particulièrement distingué dans le domaine de l’architecture avec la construction d’églises, de monastères et d’abbayes. Il se caractérise également par des sculptures représentant des scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament, ainsi que des créatures imaginaires. De plus, dans le domaine de la peinture, des artistes ont développé un sens du réalisme et du naturalisme particulièrement marqué.

Art gothique (XIIe – XIVe) : en matière d’architecture, les édifices deviennent de plus en plus imposants avec la construction de cathédrales à travers toute l’Europe. Les peintures religieuses, sous la forme de retables (panneaux en bois), embellissent les murs avec leurs représentations bibliques.

Renaissance (XIVe – XVIIe siècles) : pendant la Renaissance, l’art sacré a connu une résurgence, avec des artistes tels que Michel-Ange, Raphaël et Léonard de Vinci créant des chefs-d’œuvre religieux qui ont marqué cette période.

Baroque (XVIIe – XVIIIe siècles) : le baroque a vu l’émergence d’œuvres d’art sacré dramatiques et théâtrales, souvent commandées par l’Église catholique pour susciter l’émotion et renforcer la foi.

Art Islamique (VIIe siècle – présent) : l’art islamique a également une longue tradition d’art sacré, avec des œuvres calligraphiques, des motifs géométriques et des décorations architecturales dans les lieux de culte tels que les mosquées.

Art Asiatique (varie selon les cultures) : les cultures asiatiques, avec l’art bouddhiste entre autres, en Inde, en Chine, et au Japon, ont produit une multitude d’œuvres sacrées qui ont au fil des millénaires décorer les temples et autres lieux de cultes.

Quelles sont les fonctions de l’art sacré ?

Pendant la période médiévale, l’art sacré ou religieux avait diverses fonctions. Tout d’abord, des fonctions liturgiques en représentant visuellement des scènes importantes des livres sacrés tels que l’Ancien et le Nouveau Testament. Il avait également pour rôle de rappeler aux fidèles les fêtes importantes de l’année ainsi que les sacrements. Une fonction éducative était présente, car la plupart des fidèles étaient analphabètes à cette époque. Les images sous forme de tableaux, d’enluminures et de vitraux servaient à transmettre des messages aux pratiquants. En outre, l’art sacré revêtait une dimension symbolique, offrant une perspective spirituelle qui permettait aux personnes pieuses de mieux appréhender leur connexion au grand tout.

L’art profane dans l’Histoire

L’art profane est donc un art dépourvu de caractère religieux voire sacré. Contrairement à l’art sacré qui est souvent associé à des thèmes religieux, spirituels ou divins, l’art profane explore une gamme plus large de sujets qui peuvent inclure la vie quotidienne, la nature, la politique, la société, l’amour, la satire et d’autres aspects de la réalité humaine.

Il offre aux artistes la liberté de créer en dehors des contraintes religieuses et explore souvent des idées provocantes, des émotions complexes et des aspects controversés de la vie.

L’évolution de l’art profane a été étroitement liée aux changements culturels, sociaux et politiques au fil du temps. Au cours de différentes époques et mouvements artistiques, l’art profane a été un moyen pour les artistes d’exprimer leurs points de vue personnels, de critiquer la société, d’explorer de nouvelles idées et de défier les normes établies.

Pourtant il est important de noter, que la distinction entre l’art profane et sacré peut parfois être floue, car certains artistes peuvent fusionner ces deux dimensions dans leurs œuvres.

La question qui se pose est de savoir si l’art ne possède pas intrinsèquement une dimension sacrée. En effet, de nombreux artistes modernes et contemporains manifestent un sens du sacré à travers leurs œuvres. Ainsi, ils suscitent une interrogation d’ordre métaphysique.

L’art abstrait et sa dimension spirituelle

mark rothko
mark rothko
@Peter E

Les précurseurs de l’abstraction au XXe siècle ont fréquemment souligné son aspect spirituel, mettant en avant la notion de se détacher des éléments matériels et de renoncer à dépeindre le monde.

Il est intéressant de voir que des artistes tels que Kandinsky, Andy Warhol, Barnett Newman, Mark Rothko, Albert Gleizes, Giuseppe Penone, Anselme Kiefer et bien d’autres, parlent de leur rapport à la spiritualité quelle que soit leur confession.

La sacralité d’une œuvre n’est donc pas déterminée par son sujet et permet la manifestation du sacré en dehors d’un contexte religieux.

Elia L.

Tantôt rédactrice, tantôt artiste, je vous invite dans mon univers oscillant entre deux mondes.

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