Dans cet article, nous allons aborder la nature morte dans l’art. Ancrée dans l’histoire de l’expression artistique depuis l’Antiquité, elle a évolué pour devenir un genre riche et diversifié. Ce genre ancestral met en scène des objets inanimés, souvent issus du quotidien. De la Renaissance à nos jours, les natures mortes ont transcendé les époques et les mouvements artistiques, offrant une toile de fond fascinante pour étudier la créativité humaine. Cette exploration de la vie à travers l’inanimé, de la lumière à la texture, s’est avérée être un terrain fertile pour une pléthore d’artistes célèbres et divers, révélant ainsi l’importance continue de ce genre artistique au sein de l’histoire de l’art.
Histoire de la nature morte : de l’Antiquité à nos jours
Les premières natures mortes remontent à l’Antiquité égyptienne, où des représentations de la vie quotidienne ornaient les murs des tombeaux. Par la suite, l’art grec et romain s’est également enrichi de fresques murales dépeignant des scènes du quotidien dans des lieux tels que les tombeaux, les catacombes et les villas. Ainsi, des objets inanimés tels que des accessoires de cuisine, des fruits, des légumes et des fleurs prenaient vie sur ces différentes surfaces, pour mettre en lumière des instants familiers. Ces fresques, puis plus tard les toiles, devinrent en quelque sorte le miroir de la société et de son opulence.
Il faut attendre le XVIIIe siècle pour que le terme “nature morte” apparaisse. C’est dans les pays nordiques et plus particulièrement en Hollande, que ce style connaît son apogée. Dès le XVIIe siècle, les natures mortes sont une ode à la nature. Elles sont aussi une allusion à l’éphémèrité et par extension à la mort.
A cette époque, les querelles religieuses et les oppositions intellectuelles donnent naissance un nouveau style connu sous le nom de “Vanités“, où l’aspect philosophique et symbolique est prépondérant. Ces oeuvres reflètent les interrogations et les aspirations propre à une époque et à une culture. Pour de nombreux peintres, ce genre est un passage quasi obligé dans leur parcours créatif. A chaque époque, les artistes se réapproprient ce genre souvent destiné à une clientèle aisée, notamment des notables et des marchands hollandais. Ces natures mortes servent à la fois d’expression artistique et de miroir des préoccupations sociétales du moment.
Les natures mortes qui ont marqué l’Histoire de l’art
Voici certains de ces artistes qui ont su capturer l’éphémère tout en explorant la composition visuelle et donné vie à des symboles et des significations cachées.
- Peter Aertsen, Etal de boucher avec la fuite en Egypte (1551)
- Fede Galizia, Nature Morte, (vers 1610)
- Clara Peeters, Nature morte avec tazza en vermeil (1613)
- Jan Brueghel de Velours, Nature morte avec guirlande de fleurs et coupe (vers 1618)
- Louise Moillon, Nature morte avec panier de fruits et asperges (1630)
- Giacomo Legi, Jeune homme dans un garde-manger (1640)
- Philippe de Champaigne, Vanités (1671)
- Jean Siméon Chardin, La Raie (1728)
- Edouard Manet, Une Botte d’Asperge (1880)
- Vincent van Gogh, Vase avec douze Tournesols (1888)
- Paul Cézanne, Nature morte au crâne (vers 1898)
- Georges Braque, Violon et Bougie (1910)
- Pierre Bonnard, Iris et Lilas (1920)
- Ralph Goings, Nature morte aux poivrons (1981)
- Bernard Buffet, Nature morte à la pastèque (1986)
- Amy Nelder, Not a fragile flower (2021)
La nature morte dans l’art contemporain
Dépoussiérée par les artistes contemporains, la nature morte est portée à son paroxysme. Par son essence, la nature morte immortalise des sujets périssables, quels qu’ils soient. De ce constat, les artistes s’en amusent et en jouent. L’antagonisme inhérent de ce genre s’inscrit, une fois de plus, dans son époque qui reflète les aspects socio-économiques d’une société. Plus engagés et revendicatifs que leurs prédécesseurs, les artistes contemporains qu’ils soient peintres, photographes, sculpteurs… dénoncent les dérives d’un système axé sur la sur-consommation, le sur-emballage, la sur-médiatisation etc. Les dérives d’une société sont ainsi exposées et figées pour les générations futures.
De quoi nous parle une nature morte ?
Elle nous parle du temps qui passe, de la vie et de la mort, de l’absurdité d’un système et d’une société. Elle évoque notre propre finitude car quoi de plus difficile à accepter que la mort ? Alors, une fois de plus, l’art permet en quelque sorte d’exorciser nos peurs, d’en rire même et surtout de la rendre plus acceptable, sans pour autant, la désacraliser.