Elles sont partout autour de nous ces herbes folles considérées comme de véritables dissidentes. Facétieuses créatures de la nature, c’est justement leur caractère expansif et teigneux de ces soi-disantes “mauvaises herbes” qui me fascinent. Mal-aimées, ces adventices des jardins et des rues poussent en tout lieu sans y être invitées. Intriguée par ces plantes herbacées bien trop souvent décriées et délaissées, c’est une sorte d’ode que je leur dédie avec ma série photographique intitulée Les sauvageonnes.
La malherbologie
Nul besoin d’être un expert en malherbologie, science créée au XIX e siècle pour approcher ces ligneuses. Au même titre qu’une rose au port altier, ces enchanteresses désavouées sont pourtant bel et bien surprenantes. Ici, aucune sophistication n’est visible, la beauté y est cachée. Souvent haletante et peu engageante, la mauvaise herbe ne possède pas les attributs qui séduisent à première vue. Et pourtant, rien dans le règne végétal n’en fait pour autant une plante à blâmer dont les amoureux de fleurs devraient se désolidariser, bien au contraire.
Ce n’est pas dans un jardin à la campagne mais dans la rue que ces fleurs du macadam m’ont interpellée. C’est cette ténacité à pousser entre deux pavés aux abords d’un trottoir, cette soif de vivre ainsi que leur ingéniosité culturale qui m’ont donné l’envie de les photographier.
Ces Macadam Flowers, sont aussi ces Filles du Marais déclinées dans ma série Les Sauvageonnes. Présentes partout, leur rôle est bien plus important que nous l’imaginons dans la préservation de la biodiversité faunistique.
Une ode à l’inattendu
C’est ce côté inopiné qui ne demande point d’éloquence particulière pour une nature considérée de seconde zone qui est tellement troublante. Si attendrissantes, ces mal-aimées tantôt invisibles à nos yeux ou au contraire trop envahissantes sont pourtant bouleversantes d’authenticité. Nullement conviées, ces sauvageonnes sont sûrement la quintessence même d’une nature qui ne demande absolument rien à personne.
Des envahisseuses qui au gré du vent ensemencent les rues, les jardins, les prairies… mais aussi notre imaginaire. Du coquelicot des champs considéré comme une fleur qui endort les chagrins, à l’ortie réputée pour ses pouvoirs d’exorcisme, à la ronce qui symbolise la 10 ème lune du calendrier celtique ou encore le lierre grimpant considéré comme le favori des fées. Ces herbes symboles par excellence de la résilience ont tant à nous apporter.