Colorée, vivante et profondément humaine, la Commedia dell’Arte est l’un des plus anciens genres théâtraux d’Europe. Apparue au XVIe siècle en Italie, elle a marqué l’histoire du théâtre et continue d’inspirer dramaturges, artistes et comédiens du monde entier. Mais qu’est-ce qui rend cette forme d’art si unique ? C’est ce que nous allons voir aujourd’hui ensemble en nous plongeant au cœur de la Commedia dell’Arte, entre masques, improvisation et personnages légendaires.
Les origines de la Commedia dell’Arte
Un théâtre né dans la rue
La Commedia dell’Arte voit le jour au début du XVIe siècle en Italie, dans un contexte où le théâtre est encore réservé aux élites. Contrairement aux pièces écrites et formelles jouées dans les cours royales, la Commedia s’installe dans les places publiques, accessible à tous. Les troupes itinérantes, souvent composées de familles, voyagent de ville en ville pour offrir des spectacles spontanés, mêlant comédie, satire et interaction avec le public.
Cette popularité naissante repose sur deux piliers fondamentaux : l’improvisation et les personnages typiques. Les acteurs de la Commedia dell’Arte ne suivent pas de texte écrit mais improvisent autour d’un canevas, une trame narrative esquissée. Cela leur permet de s’adapter au contexte local et d’intégrer des références culturelles ou politiques qui captivent leur public.
Les masques et les personnages emblématiques
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Des figures universelles
Au cœur de la Commedia dell’Arte se trouvent des personnages stéréotypés qui incarnent des archétypes universels. Chacun porte un masque, à la fois pour accentuer ses traits caractéristiques et pour renforcer l’aspect visuel et symbolique de la représentation. Parmi ces figures devenues célèbres vous en reconnaîtrez sûrement certains, les voici :
- Arlequin (Arlecchino) : vif et espiègle, ce valet malicieux est connu pour son costume en losanges colorés.
- Colombine (Colombina) : maligne et indépendante, elle représente souvent l’amoureuse libre et audacieuse.
- Pantalone : citoyen de Venise, vêtu d’une longue culotte. C’est un vieil avare obsédé par l’argent, caricature de la cupidité.
- Polichinelle (Pulcinella) : rusé et sarcastique, il est à l’origine du personnage de Guignol.
- Le Docteur (Il Dottore) : originaire de Bologne, érudit pédant, il symbolise la vanité intellectuelle.
- Pierrot (Pedrolino) : niais et plaisantin, il porte un vêtement blanc et son visage est enfariné. C’est d’ailleurs pour cela qu’il ne possède pas de masque.
- Scaramouche (Scaramuccia) : valet hâbleur, fabulateur et froussard. Vêtu entièrement de noir à la mode espagnole, il porte également une longue rapière (épée longue et fine). Il se fait passer pour un duc ou un prince, même s’il n’est qu’un simple valet.
Il y a aussi les amoureux, autour desquels se noue l’action avec des personnes tels que Isabella, le jeune premier et Lelio. Aujourd’hui certains de ces personnages sont présents dans les corsos des carnavals du monde entier.
Bien qu’ancrés dans la culture italienne, ces personnages reflètent des traits universels de la société humaine. C’est cette intemporalité qui permet à la Commedia dell’Arte de traverser les siècles et de s’adapter aux sensibilités modernes.
Les masques, outils d’expression
Les masques jouent un rôle clé dans la Commedia dell’Arte. Ils ne se contentent pas de cacher l’identité des acteurs, mais amplifient leurs expressions et gestes. Chaque masque est unique, conçu pour refléter le caractère du personnage : la ruse d’Arlequin, la gravité de Pantalon ou la malice de Polichinelle. Ces masques permettent une exagération des traits, renforçant l’aspect comique et caricatural des performances.
Difficile de ne pas évoquer le carnaval de Venise où les masques tiennent un rôle très important.
L’improvisation au cœur de la Commedia
Un art spontané
L’improvisation est l’essence même de la Commedia dell’Arte. Les acteurs, formés dès leur plus jeune âge, développent une maîtrise exceptionnelle des gestes, des expressions et de la voix. Grâce à leur canevas – une structure narrative de base –, ils improvisent dialogues et situations, réagissant aux réactions du public et aux événements du moment.
Cette spontanéité donne naissance à des performances uniques, chaque spectacle étant différent du précédent. Les acteurs interagissent également avec les spectateurs, brisant le quatrième mur pour inclure le public dans l’histoire, une pratique encore utilisée aujourd’hui dans le théâtre interactif et l’improvisation moderne.
L’héritage de la Commedia dell’Arte
Une influence mondiale
Bien que son apogée se situe entre le XVIe et le XVIIIe siècle, la Commedia dell’Arte a laissé une empreinte indélébile sur l’histoire du théâtre. Elle a influencé des dramaturges tels que Molière, qui s’est inspiré de ses personnages pour créer des figures emblématiques comme Scapin ou Harpagon. Elle a également marqué le théâtre populaire et le cirque, où l’exagération des gestes et les types caricaturaux sont omniprésents.
Au-delà du théâtre, la Commedia dell’Arte continue d’inspirer la culture contemporaine, du cinéma à la bande dessinée, en passant par les arts de rue. Les archétypes qu’elle a popularisés résonnent encore aujourd’hui, témoignant de son universalité et de sa modernité.
Un art vivant
La Commedia dell’Arte n’est pas qu’un vestige du passé. De nombreuses troupes à travers le monde continuent de faire vivre cet art, mêlant tradition et innovation. Des festivals et des ateliers permettent aux nouvelles générations de découvrir cette forme théâtrale unique, qui célèbre l’humour, l’humanité et la créativité.
Qu’il s’agisse de ses masques emblématiques, de son improvisation captivante ou de son impact sur l’histoire du théâtre, la Commedia dell’Arte reste un pilier incontournable de la culture mondiale. Une invitation à rire, réfléchir et célébrer la richesse des relations humaines.